Plus de soixante personnalités étrangères, chefs d’Etat, ministres ou hommes d’affaires controversés, ont investi des centaines de millions d’euros en France pour acheter des maisons ou des appartements de luxe. “L’Obs”, associé à un collectif de journalistes indépendants, dévoile l’ampleur du phénomène, sur lequel plane de forts soupçons de blanchiment d’argent sale. Sous le regard plus que passif des notaires et des autorités.
Dans un jugement du 6 juillet 2022, le tribunal de Nanterre a condamné l’État pour sa tentative de perquisition des locaux de Mediapart du 4 février 2019, la jugeant « ni nécessaire dans une société démocratique ni proportionnée à l’objectif poursuivi ». Le jugement, très sévère pour le parquet de Paris, consacre la liberté d’informer et la protection des sources.
Soulignant « l’effet d’intimidation » recherché par ce déplacement en nombre de personnes « appartenant à la hiérarchie intermédiaire du parquet de Paris et, pour l’un d’entre eux, de l’institution policière », le jugement oppose à cette « coercition caractéristique de la perquisition » le fait que « les autorités judiciaires, confrontées à un organe de presse jouissant d’une protection légale accrue, disposaient d’un moyen simple, peu intrusif et non contraignant, consistant en l’envoi d’une réquisition ». Au lieu de quoi le parquet a choisi, écrit le tribunal, « l’emploi immédiat d’une mesure intrinsèquement coercitive, ou susceptible de le devenir en cas de refus, et significativement plus intimidante ».
En juillet 2021, Mediapart révélait un système d’encaissement illégal d’argent liquide au sein du groupe Fnac-Darty. Depuis, quatre directeurs de magasins Darty et un directeur régional ont été mis en examen. Selon de nouveaux documents et témoignages, de nombreux cadres dirigeants du groupe auraient eu connaissance de ces opérations réalisées dans toute la France, au-dessus des seuils légaux.
La Commission européenne ne dispose pas de lignes directrices détaillées sur le recours aux consultants externes, expliquent les auditeurs de la Cour des comptes l’Union européenne, qui ont mis en garde contre les risques de conflit d’intérêts et de dépendance excessive à l’égard d’un petit nombre de sociétés de conseil.
Au cours de leur enquête, les auditeurs de la CCE ont constaté que le recours à des consultants externes financés par le budget de l’UE ne garantit pas entièrement une optimisation des ressources. Si l’étude ne nomme pas de contractants en particulier, elle démontre qu’il existe un risque important de concentration et de dépendance excessive à l’égard d’un petit nombre de sociétés de conseil.
Lancement retardé, critères imprécis et manque de sensibilisation des élus locaux et des entreprises : l’extension du répertoire des représentants d’intérêts au monde local sera un défi, tant il cumule les embûches et les flous juridiques.
Concrètement, cette réforme, issue de la loi « Sapin 2 » du 11 octobre 2013, oblige les représentants d’intérêts à déclarer leurs activités d’influence sur un répertoire national, dont la gestion est confiée à la HATVP. Ce recueil, en vigueur depuis cinq ans pour les seules décisions nationales, est étendu à compter du 1er juillet à la sphère locale.
En octobre dernier, la haute autorité a publié une étude sur l’encadrement de la représentation d’intérêts dans laquelle elle dresse un bilan au vitriol. Parmi les griefs figure celui du champ des décisions publiques concernées : « trop large », « mal défini », d’après l’institution présidée par Didier Migaud. Selon ce dernier, « cette définition entraîne un nombre trop important d’informations retranscrites, or trop d’informations noie l’information ».
Autre trou dans la raquette : le critère d’initiative. Selon la loi, une action de représentation d’intérêts ne peut être considérée comme telle que si l’entrée en communication avec le responsable public est réalisée à l’initiative du lobby. Ce qui exclut de facto du champ du répertoire toutes celles conduites en réponse à une demande de responsables publics, « constituant une part non négligeable de l’activité des représentants d’intérêts », selon l’étude de la HATVP.
En 2013, une information judiciaire est ouverte contre des sociétés du groupe français, soupçonnées d’avoir financé la réélection du président du Togo, Faure Gnassingbé, dont la famille monopolise le pouvoir depuis plus de cinquante ans, par l’intermédiaire d’une filiale du groupe, qui aurait sous-facturé ses services. En échange, le dirigeant africain aurait permis à Vincent Bolloré de récupérer la concession du port de Lomé, le seul port en eau profonde de la côte ouest africaine.
Jugés le 26 février 2021 devant le tribunal judiciaire de Paris, les trois hommes reconnaissent les faits qui leur ont été reprochés. Ils plaident coupables pour les faits de corruption active d’agent public étranger et complicité d’abus de confiance au Togo, et acceptent le paiement d’une amende de 375 000 euros chacun. Toutefois cette procédure, négociée en amont avec le Parquet national financier, et qui devait éviter la tenue d’un procès, est rejetée par le tribunal judiciaire de Paris, qui estime que les faits sont trop graves.
Pour ces mêmes faits la société Bolloré SE, a quant à elle, pu bénéficier d’une procédure de justice négociée par la conclusion d’une Convention Judiciaire d’Intérêt Public (CJIP) aux termes de laquelle elle devra s’acquitter d’une amende de 12 millions d’euros mais échappe aux autres sanctions pénales dont une très importante : l’interdiction de concourir à un marché public. Sherpa et Anticor se sont constituées dans le cadre de cette information judiciaire notamment pour rappeler l’importance de la tenue de débats publics concernant les faits de corruption, et alerter sur les dangers et dérives de toutes les formes de justice négociée qui se sont développées récemment.
A l’échelle des 52 millions que pourrait coûter le futur « Arbre aux hérons » nantais (dernière estimation en date), cela peut sembler une petite goutte d’eau. Mais une goutte d’eau qui en dit long sur la manière dont ce dossier est géré et sur l’inflation faramineuse qu’a connu le projet depuis son lancement il y a une dizaine d’années. Jeudi 30 juin, l’antenne d’Anticor en Loire-Atlantique publie un communiqué dans lequel il s’étonne « des montant des honoraires décidés et accordés pour la Mission d’assistance et d’expertise juridique concernant cette opération ».
Quand Ursula von der Leyen a vanté un « jour véritablement historique » au lancement, à l’été 2021, du gigantesque plan de relance européen, personne n’a contesté la prétention de la présidente de la Commission européenne. Les 700 milliards d’euros débloqués pour enrayer le choc économique dû au Covid-19 relèvent du jamais-vu sur le continent. Mais, un an plus tard, Bruxelles et les Vingt-Sept se montrent beaucoup plus réservés à l’heure de répondre à une question en apparence simple : « Où est passé l’argent ? »
En octobre 2021, la même Ursula von der Leyen promettait de « garantir la transparence » des crédits européens, défendant l’idée qu’il s’agit d’une condition du succès du plan de relance. Mais, derrière ce discours de façade, l’Union européenne (UE) délivre les informations sur l’utilisation de ses subsides au compte-gouttes, démontre l’enquête du collectif #RecoveryFiles, lancée par la plate-forme néerlandaise d’investigation Follow the Money, et dont Le Monde est partenaire.
Trente-quatre logements sociaux ont été inaugurés mercredi à Paris sur un terrain ayant appartenu à Rifaat al-Assad, l'oncle du président syrien, dans l'un des quartiers les plus huppés de l'Ouest parisien. La mairie de Paris avait versé 9,5 millions d'euros d'indemnités d'expropriation à la Caisse des Dépôts.
En septembre 2021, l'ancien vice-président de Syrie Rifaat al-Assad, âgé de 84 ans, avait été reconnu coupable par la cour d'appel de Paris de blanchiment en bande organisée et de détournement de fonds publics syriens entre 1996 et 2016.
La cour avait ordonné la confiscation de l'ensemble de ses biens immobiliers frauduleusement acquis, évalués à 90 millions d'euros, et l'avait en outre condamné pour blanchiment de fraude fiscale aggravée et pour le travail dissimulé d'employés de maison. La Cour de cassation examinera le 7 septembre le pourvoi formé par Rifaat al-Assad.